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Information Charybde

Les best-sellers 2014 de la librairie Charybde

2014 était la quatrième année d’activité pour notre librairie Charybde, la troisième année pleine depuis la création en juin 2011.  Avec une progression de 15 % du chiffre d’affaires, avec de plus en plus de clientes et de clients qui ne nous connaissaient pas à l’origine, nous nous demandions à nouveau comment évolueraient nos « meilleures ventes », qui reflètent probablement un subtil équilibre entre goûts des libraires, prosélytisme assumé, envies de notre public et échanges entre toutes celles et tous ceux qui fréquentent le 129 rue de Charenton (75012 Paris).

Pour la première fois, aucune de nos 20 meilleures ventes de l’année ne figurait déjà dans le classement correspondant d’une année précédente, 2011, 2012 ou 2013.

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Que trouvait-on en 2014 parmi ces vingt meilleures ventes de l’année ?

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Fazi Volodine Tuttle

1. « Le jardin des silences », de Mélanie Fazi, son impressionnant troisième recueil de nouvelles distillant un fantastique subtil, capable aussi bien de relire des motifs et des mythes familiers que de créer ex nihilo une intime complicité et une troublante émotion avec le lecteur.

2. « Terminus radieux », d’Antoine Volodine, grand roman et formidable point d’entrée dans l’œuvre d’un écrivain exigeant, qui développe patiemment depuis trente ans l’une des plus puissantes mythologies d’un monde presque contemporain.

3. « Les chambres inquiètes », de Lisa Tuttle, saisissant recueil de nouvelles, emblématique du travail passionnant de l’une des plus belles et des plus riches écritures du fantastique actuel.

Dufour Le Carre Bordaçarre

4. « Guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses », de Catherine Dufour, tranchant, hilarant et instructif, une série de vignettes documentaires sur des métiers et les femmes qui les exercent, formant essai pour casser de bien tenaces codes sexistes.

5. « À pleines dents la poussière », de Stéphane Le Carre, Ouest américain et Ouest français résonnant de manière brutale et tendre à la fois, au détour de nouvelles malignes et insidieuses sous les rires et les grincements, couronnées par un extraordinaire personnage de samouraï de la pétanque hantant le parc parisien des Buttes-Chaumont.

6. « Dernier désir », d’Olivier Bordaçarre, relecture savoureuse et effrayante du mythe du vampire et du voisin qui vous veut un peu trop de bien, transplanté dans la solitude campagnarde de maisons retapées au bord d’un paisible canal désaffecté.

Daoud Leroy Khair

7 ex æquo. « Meursault, contre-enquête », de Kamel Daoud, beaucoup plus qu’une relecture de « L’étranger » de Camus, pris à contre-point de vue, par les yeux du frère de la victime, une magistrale et poignante plongée en colonie et post-colonie, dans les échecs de la politique, de la justice et de l’amour. Ma collègue et amie Charybde 7 vous le dit avec force ici.

7 ex æquo. « L’ange gardien », de Jérôme Leroy, un tueur poète émargeant au plus secret des services secrets, un écrivain en proie aux doutes et aux tentations dépressives, une jeune politicienne issue de l’immigration africaine, pour un cocktail puissamment détonant, politique en diable et sentimental en beauté, dans l’univers qui deviendra celui du « Bloc ».

9. « Comment lutter contre le terrorisme islamique dans la position du missionnaire », de Tabish Khair, trois indo-pakistanais installés au Danemark, contribuant à une narration incroyable, qui réussit le tour de force de questionner simultanément nos préjugés politiques et sociaux autour du terrorisme islamique, et nos présupposés quant à ce que devrait être la création littéraire. Charybde 7 a saisi l’essence de ce texte hors normes, ici.

Darger Hunt Salzman

10 ex æquo. « L’histoire de ma vie », de Henry Darger, la flamboyante richesse et la subtile émotion de l’autobiographie d’un énigmatique artiste maudit américain, écrite au soir de sa vie, mélange à chaque instant surprenant de rêve et de réalité, de fantasme et de rappel au dur de la vie.

10 ex æquo. « Les bonnes gens », de Laird Hunt, vraie-fausse histoire campagnarde américaine, très difficile à évoquer sans risquer de le déflorer bien dommageablement. Ma collègue et amie Charybde 1 y est magnifiquement parvenue, ici.

10 ex æquo. « Dernières nouvelles d’Œsthrénie », d’Anne-Sylvie Salzman, époustouflante création d’un pays balkanique imaginaire, de ses villes, de ses terroirs, de ses contes, de ses figures mythiques, et de son destin au cours du siècle écoulé, par les yeux de protagonistes différents, aux lisières de la grande Histoire et d’un fantastique qui ne dirait jamais son nom.

Yu Hua Kerangal Zalberg

13 ex æquo. « Le septième jour », de Yu Hua, fantastique et grinçant enchevêtrement de tragédies individuelles et collectives, de critique sociale et politique soigneusement mesurée et conduite, dans la Chine contemporaine, roman passionnant que décrit superbement Charybde 1, ici.

13 ex æquo. « Réparer les vivants », de Maylis de Kerangal, pénétrante et poignante investigation, le temps de la gestion d’une crise humaine et technique, de toutes les composantes de l’univers de la greffe médicale de haut niveau, somme fulgurante d’histoires personnelles au service de la compréhension intime d’une merveille toujours ambiguë. Et Charybde 7 vous le fait superbement partager, ici.

13 ex æquo. « Feu pour feu », de Carole Zalberg, télescopage éblouissant, rythmé et martelé en une chanson sourde, du récit d’un réfugié politique clandestin, ayant fui son Afrique natale, et de celui de sa fille, échappée avec lui aux flammes de la guerre civile, devenue adolescente de cité en contradictions explosives.

Fager Henry Louis

16 ex æquo. « Les furies de Borås », d’Anders Fager, extraordinaire recueil de contes horrifiques scandinaves, sachant unir en une alchimie impressionnante l’ancien et le moderne, le mythique transfiguré et l’imagination débridée la plus pure.

16 ex æquo. « Le casse du continuum », de Léo Henry, jouissive transposition en science-fiction flamboyante du « film de casse », que ne renieraient ni Danny Ocean ni Henry Dorsett Case ni Kith Gersen, dans une mise en scène soignée et riche en humour décapant.

16 ex æquo. « En finir avec Eddy Bellegueule », d’Édouard Louis, impressionnante fiction autobiographique, curieusement controversée, dans laquelle un adolescent homosexuel souffre durement avant de parvenir à échapper à son milieu déshérité, sauvagement étouffé et étouffant.

Adely Ligotti Lortchenkov Manuel

19 ex æquo. « La très bouleversante confession de l’homme qui a abattu le plus grand fils de pute que la Terre ait porté », d’Emmanuel Adely, hallucinant monologue intérieur, hanté de christian metal et de call of duty, d’un soldat américain des forces spéciales, en route pour exécuter un chef terroriste islamique universellement connu.

19 ex æquo. « Chants du cauchemar et de la nuit », de Thomas Ligotti, un recueil de nouvelles d’un authentique maître secret de l’horreur contemporaine, à la fois lointain émule d’un Lovecraft et artisan d’une écriture ambitieuse, raffinée, maîtrisée, au service d’un vertige existentiel permanent qui déstabilise et enchante le lecteur comme rarement.

19 ex æquo. « Des mille et une façons de quitter la Moldavie », de Vladimir Lortchenkov, farce extraordinaire, déjantée et haletante de bout en bout, pour dire la pauvreté d’une nation, la corruption des élites, le désir d’émigration, les difficultés à surmonter, l’imagination sans limites pour saisir un miroir, fût-il aux alouettes, avec tout l’humour décapant du désespoir qui guette sans cesse.

19 ex æquo. « 029-Marie », de Franck Manuel, comme Philip José Farmer s’en fit longtemps une belle spécialité, l’approche par la science-fiction prouve ici à nouveau à quel point elle est puissante et pertinente pour capter, paradoxalement, l’essence du sexe, de l’amour, du corps et de l’intime. Et Charybde 1 le dit fort joliment, ici.

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Voilà donc vingt-deux livres qui constituent me semble-t-il un beau résumé de 2014 chez Charybde, associant littérature générale qui n’hésite pas à s’approcher des frontières et des marges des genres, littérature de genre ambitieuse et souvent légèrement atypique, scalpels prêts à trancher et vagues poétiques maîtrisées, de l’ici et de l’ailleurs, du maintenant et du demain.

Tout ce qu’on aime, donc, rendu vivant et actif grâce à nos lectrices et à nos lecteurs qui, plus que jamais durant cette quatrième année d’existence, nous soutiennent et nous précèdent bien souvent dans l’exploration toujours à reconduire de la beauté hybride de la littérature et du monde.

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À propos de Hugues

Un lecteur, un libraire, entre autres.

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