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Notes de lecture 2013

Note de lecture : « Et quelquefois j’ai comme une grande idée » (Ken Kesey)

Le bois flotté sur la rivière, la sauvagerie, la tendresse et l’obstination tout autour.

kesey

Le lecteur français aura dû attendre 49 ans pour pouvoir lire, grâce à l’inspiré éditeur toulousain Monsieur Toussaint Louverture, la traduction du deuxième roman de Ken Kesey, mythique auteur de « Vol au-dessus d’un nid de coucou ».

Le long de la Wakonda, aux confins d’un Oregon du début des années 1960 que commencent à peine à agiter les soubresauts du rêve américain, la famille Stamper, avec sa devise « Ne cède jamais d’un pouce », incarne le rude idéal du bûcheron en lutte quotidienne et effroyable avec la puissance d’une nature à peine apprivoisée, encore apte à se défendre avec vigueur face aux assauts humains. Lorsque les forestiers du district, pour protester contre les baisses de prix imposées par les grandes compagnies, entament une grève que les Stamper refusent de suivre, et que le fils cadet, étudiant dans l’Est, revient au bercail avec de secrètes intentions vengeresses, les ingrédients d’une tragédie, construite avec le soin retors et l’habileté langagière du meilleur Faulkner, sont rassemblés, prêts à donner tout son sens à ce « Et quelquefois j’ai comme une grande idée », phrase-titre extraite de « Goodnight Irene », sombre ballade de Leadbelly, qui se poursuit ainsi : « De sauter dans la rivière et de m’y noyer ».

Une narration forte et subtile à la fois, qui dégage, au fil des pages, de la confusion apparente et d’abord déroutante d’une communauté villageoise au bord du gouffre, les voix singulières et les monologues hantés d’une foisonnante galerie de personnages, déterminés et entiers, rageurs et obsessionnels, gouailleurs et pensifs, secrets et faussement bavards, politiques et rêveurs, au service d’une construction dramatique d’une intensité exceptionnelle, et d’un inattendu charme poétique.

Un très grand roman américain, méritant de figurer parmi les quelques chefs d’œuvre qui résonnent en chacune et chacun longtemps après leur lecture.

Il faut lire la préface imaginaire écrite par le grand Théo Hakola, ici.

Le film « Sometimes a Great Notion » (platement rendu en français par « Le clan des irréductibles »), réalisé par Paul Newman en 1970, avec de belles performances d’acteur d’Henry Fonda, Paul Newman et Richard Jaeckel, tout particulièrement, est fort agréable, même s’il simplifie diablement le foisonnement de l’intrigue du livre et en change quelque peu la fin. En revanche, ne le regardez pas (peut-être même pas la bande-annonce ci-dessous) avant de lire le livre, car certaines scènes-clé y sont « spoilées » à la va-vite, ce qui est bien dommage évidemment…

Pour acheter le livre chez Charybde, c’est .

À propos de Hugues

Un lecteur, un libraire, entre autres.

Discussion

6 réflexions sur “Note de lecture : « Et quelquefois j’ai comme une grande idée » (Ken Kesey)

  1. C’est symptomatique : foisonnant est aussi un terme que j’ai noté pour ma chronique avec touffu, tout fou, fourmillant… Un roman effectivement dense et magnifique qui sait habilement entremêler les récits (il faut arriver à en avoir une vue d’ensemble pour pleinement l’apprécier) et parfois laisser de la place au développement d’un personnage (le barman, le syndicaliste, Lee…).

    Publié par garoupe | 14 février 2014, 11:43

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