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Notes de lecture 2014

Note de lecture : « La robe » (Robert Alexis)

Confession d’une métamorphose troublante, autour de la fascination pour une robe.

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Le narrateur livre la confidence qu’il a recueillie un jour d’un ancien officier, au soir de sa vie.

«C’est un lieu commun de prétendre que certaines rencontres infléchissent le cours d’une vie, l’orientent dans une direction jusqu’alors insoupçonnée. De telles expériences, pourtant ne font qu’ajouter à ce que l’on est. Il est fréquent d’oublier qui en fut la cause. La vague provoquée s’ajoute à toutes les autres et on reconnaît là, selon ses convictions, la force du hasard ou celle du destin.
Plus rares sont les événements auxquels on ne peut accorder aucune place, qui restent en soi comme des lignes infranchissables. Bien des mots que me confia cet homme sont aujourd’hui oubliés, mais je conserve l’essentiel comme un troublant héritage.»

Dans un lieu et une époque indéterminés, mais qu’on imagine être l’Empire austro-hongrois à la veille de la première guerre mondiale, l’homme, alors jeune aspirant officier de la haute noblesse, désœuvré dans l’armée et souvent mélancolique, est fasciné par le récit d’un de ses subalternes, Alvinczy, racontant sa rencontre avec une femme à l’accent italien, au physique superbe et aux mœurs libertines. Il l’a remarquée à la sortie de l’opéra au bras d’un homme âgé mais d’une autorité et d’un charme indéfinissables et sulfureux.

«Quand je pense à lui, c’est la cime d’une colline que je vois, une ligne cachée par des lambeaux de brume. On sait que, là-haut, vivent des animaux fantastiques, l’air y est à la fois doux et dangereux.»

L’histoire de cette rencontre hypnotise l’aspirant officier qui n’a dès lors de cesse que de connaître cette femme, malgré les mises en garde d’Alvinczy, qui, loin de le détourner de son but, agissent sur lui comme un stimulant supplémentaire.

«… Seulement il vous faudra prendre garde. Cette Italienne n’est pas une simple fille à soldats, elle porte un secret, c’est évident ! Peut-être est-ce une espionne, quelque chose comme ça… Je n’aimerais pas que vous tombiez dans un guêpier !»

Jusqu’où cette relation et la rencontre avec l’homme qui l’accompagne vont-elles l’entraîner ? Vers une révélation de ses aspirations profondes ou dans un abîme de perversion ?

«Chaque homme porte en soi son «point de retenue» ; voilà ce qu’il faut découvrir afin de se libérer.»

Ce roman très bref, le premier de l’auteur paru en 2006 aux éditions José Corti, est une réussite superbe, racine de l’œuvre envoûtante de cet écrivain de la transgression qu’est Robert Alexis, un questionnement sur les identités troubles dans une ambiance surannée avec une écriture classique et raffinée, sillon magistralement approfondi jusqu’à son neuvième roman «L’homme qui s’aime».

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À propos de Marianne

Une lectrice, une libraire, entre autres.

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