Un faux conte érotique scandaleux, dont l’écriture agencée renforce l’authentique pouvoir de choc.
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Publié en septembre 2012 chez Verdier, le douzième roman d’Anne Serre est déroutant à plus d’un titre.
Déroulant à la manière d’un conte autobiographique plein de grâce et de légèreté le souvenir d’une enfance au sein d’une famille où le sexe, totalement libéré, inclut inceste, échangisme et implication des amis, parsemé de scènes érotiques crues et joyeuses, le récit de la narratrice, ayant quitté sa famille à quinze ans pour ne revoir ses sœurs que quelques années plus tard, après la mort prématurée de leurs parents, dérange indéniablement.
Loin des pornographies charcutières (© Judith Vernant) encensées par une certaine critique, le style utilisé par Anne Serre crée infiniment plus de dégâts et de questionnements chez le lecteur, à qui il est extrêmement difficile de ne pas se laisser entraîner dans cette ronde joyeuse et hautement choquante, dont les véritables abîmes résident nettement dans l’impressionnant ensemble de non-dits, jalonnant les soixante pages comment autant d’avertisseurs…
Un livre dont la virtuosité de l’écriture renforce le sombre pouvoir de l’apparence guillerette.
Je ne voudrais pas, ici, sembler faire l’apologie des liens sexuels en famille : je sais trop combien le sujet est délicat. Mais puisque j’ai résolu de raconter ma vie en tentant d’exprimer le plus exactement possible ce que j’éprouvais dans cette situation déréglée et pourtant si réglée qui était la nôtre, nul ne me convaincra de m’arracher les cheveux, de couvrir ma tête de cendres, de pleurer, puisqu’au fond de moi nul ne pleure, mais au contraire, rit et demande à danser.
Et je trouvai que tout était bien, que le monde traçait en riant des boucles, des volutes, qu’il suffisait – comme je l’avais toujours su, toujours cru – d’être extrêmement attentif pour que vivre vous procure une joie terrible, pour que se fabrique une œuvre d’art grâce à votre corps, à vos mains, à vos yeux, à votre pauvre cœur brisé.
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