Savoureuse et inspirée mise en scène de l’irruption massive de migrants extra-terrestres sur Terre.
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Publié en 2012 au Bélial, ce roman du prolifique Laurent Genefort pourrait d’abord apparaître comme une « simple » mise en scène pseudo-réaliste de l’arrivée massive d’extra-terrestres sur Terre (dans la veine d’un « World War Z » de Max Brooks en matière de zombies ou du savoureux « An Introduction to Planetary Defense ») de Travis S. Taylor et Bob Boan , ce qui ne serait déjà pas si mal.
Mais ces 220 pages (plus un glossaire et diverses illustrations) valent encore mieux : sous couvert de l’irruption, par vagues massives, de « migrants » extra-terrestres, ressortissants d’innombrables espèces (toutefois toutes plus ou moins adaptées à l’environnement terrestre) utilisant de mystérieuses « bouches » apparues peu à peu à la surface de notre planète pour poursuivre leurs périples, et par plusieurs biais habiles qui seraient pour beaucoup d’entre eux le pendant littéraire de l’excellent « District 9 » de Neill Blomkamp au cinéma, Laurent Genefort nous livre, au gré de plusieurs fils conducteurs distincts (et de diverses « insertions » issues d’actualités médiatiques) une savoureuse et songeuse réflexion sur le tout à fait réaliste et contemporain : guerres civiles africaines et sens toujours difficile de l’action humanitaire (magnifique épisode en Somalie), ambiguïtés fondamentales des sociétés privées de sécurité, fût-ce sous mandat de l’ONU, « entrepreneurs » opportunistes sachant transformer (ou essayer de transformer) tout événement en un juteux marché, faisant fi éventuellement (ou non) de considérations éthiques déplacées, ou encore disparition des modes de vies ancestraux et des habitats naturels (la « mission » dont se chargent spontanément les tribus sibériennes des Nenets constitue pour moi le moment le plus beau et le plus fort de tout le roman, résonnant d’aileurs de manière inattendue avec l’extraordinaire « Éloge des voyages insensés » de Vassili Golovanov comme avec l’album photographique « Nomad » de Jeroen Toirkens)…
Utilisant de façon très directe la métaphore de l’extra-terrestre comme « étranger absolu », cristallisant donc toutes les attitudes humaines possibles vis-à-vis de « l’Autre », mais sachant dépasser l’image pour atteindre, servi aussi par une construction en mosaïque aux styles volontairement disparates (échanges de mails, journaux de bord, reportages, échanges radio tactiques,…), des réflexions plutôt subtiles, Laurent Genefort réussit un roman à la fois fort distrayant et sensiblement plus puissant que ce que l’apparente modestie du propos laissait supposer. À recommander bien au-delà des cercles de passionnés de science-fiction !
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