90 fragments enchantés de passion du foot par l’un des plus grands poètes italiens contemporains.
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Publiée en 2010, traduite en français en 2012 chez Actes Sud, dans la collection Un endroit où aller, par René Corona et Marguerite Pozzoli, cette belle curiosité est l’œuvre de Valerio Magrelli, généralement considéré comme l’un des plus grands poètes italiens contemporains.
Ces 90 récits d’une minute (ou un peu moins, ou un peu plus) content, à la vitesse exacte d’un match de football, l’histoire d’une passion vécue par l’auteur, abordant toutes les époques de sa vie, d’enfant, de joueur amateur, de joueur du dimanche matin, de supporter et de père, tout cela en ordre soigneusement dispersé, autour du football.
Même sans être fan de ce sport, l’intelligence et la sensibilité de l’écriture de Magrelli impressionneront.
« Entre-temps, mon fils grandissait, et je l’emmenai dans un jardin public pour essayer des gants et des chaussures à crampons qu’il avait reçus en cadeau. Je crois que les chaussures, il ne les mit plus, après cette première fois. Il se sentait ridicule dans cette posture, sur la pointe des pieds. Il ne manque plus que le tutu, me disait-il. Je compris, à partir de là, qu’il en avait fini avec le foot, je veux dire avec le foot illimité, celui des stades à perte de vue, ceux où il faut agripper le terrain, à la force des crampons et du souffle. Par ailleurs, à vrai dire, le terrain m’avait toujours fait peur, à moi aussi. Pour ce qui est de jouer, j’y jouais, mais il était vraiment trop immense, et toujours peuplé d’ailiers véloces. Qu’est-ce que je faisais là, immobile, perdu dans ces étendues parcourues d’adversaires jaillissants ? » (4e minute de la 1ère mi-temps)
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Et comme un clin d’oeil en passant au « Palombella Rossa » de Nanni Moretti :
« Cette histoire de dessous d’escalier, de tiroirs secrets, de débarras cachés m’en rappelle une autre, plus domestique. Durant des années, je me suis entraîné au water-polo, la nuit, dans les sous-sols d’un stade. Cela peut paraître étrange, mais juste au-dessous de la pelouse, il y avait les salles de sport et la piscine, pour nous, les Amphibiens, le peuple du chlore. Une nuit seulement, nous assistâmes au miracle. Juste au bout du couloir lugubre conduisant au bassin, une lumière très vive s’alluma soudain. Nous regardâmes, tous autant que nous étions, par une espèce de meurtrière horizontale, et finalement nous vîmes.
Nous vîmes une pelouse vert émeraude, immense, qui brillait sous les projecteurs, et vingt-deux footballeurs immaculés qui prenaient place pour jouer. Aucun spectateur, à part nous, les Souterrains, et pour peu de temps. Au bout de quelques minutes en effet, la femme de ménage décida de nous chasser. Mais en tout cas, nous pouvions être sûrs d’une chose : au-dessus de nous, là-haut, existait une forme de vie aérée et bariolée, différente, bien différente du noir-bleu ciel de notre sous-sol. »
Un parfait rebond ou complément à la belle anthologie « Temps additionnel » des éditions Antidata, ou au passionné « Carton jaune » (titre français un peu décevant de « Fever Pitch ») de Nick Hornby.
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Photo © Dino Ignati (http://www.dinoignani.net)
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