Un road novel de banditisme, rock, brutal, exotique, tourmenté, et très réussi.
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Septième roman de l’Argentin Leonardo Oyola, et le deuxième à être publié en français, en 2012, par les formidables défricheuses des éditions Asphalte, « Chamamé » oscille avec bonheur entre furie nihiliste déjantée et comédie parodique multi-référencée, rappelant donc en effet, comme cela a été abondamment signalé, certains des signes distinctifs de la « manière » d’un Tarantino.
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Dans la région argentine des « trois frontières », zone de quasi non-droit aux confins du Brésil et du Paraguay, « Chamamé » raconte, entrecoupé de multiples flashbacks, l’aboutissement de la collaboration et de la rivalité de deux braqueurs aussi fous et violents l’un que l’autre, Noé – qui se donne volontiers de redoutables airs de prêcheur biblique – et Perro, conducteur hors pair, rocker, amateur insatiable de musique, improbable néo-romantique cultivant in petto sa passion amoureuse impossible entre casses, prisons, bars et prostituées – et narrateur du roman.
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Sur un rythme hallucinant où le beat latin metal et rock FM alterne les instants d’une violence inouïe et ceux d’une rêveuse nostalgie, un road novel brutal, exotique, tourmenté, et parfaitement réussi.
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« Angie Dickinson a fermé un œil et s’est concentrée sur la tonsure de Noé, que l’on distinguait à peine derrière la tête de l’otage. Elle en a également profité pour réduire de moitié la distance qui les séparait. Mais quelle idiote ! Elle s’était sûrement dit : « Tout doucement, j’avance de quelques pas et comme ça je me rapproche de l’autre cinglé », alors que c’était le cinglé en question qui la laissait approcher. Noé dissimulait le pasteur Jimenez dans sa manche, c’était un couteau avec une lame en acier du Brésil de quarante-cinq centimètres de long qu’il avait piqué à un vendeur black de la villa Elisa. En fond sonore, Miguel Mateos participait à la scène en leur infligeant un massacre musical qui dégueulait des hauts-parleurs. »
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Signalons au passage l’excellente initiative et habitude des éditions Asphalte et des auteurs qu’elles traduisent en français : fournissant avec chaque livre une playlist spécialement travaillée pour l’occasion par l’auteur, non seulement elles nous fournissent régulièrement un bon paquet de moments musicaux parfaitement adaptés à l’ambiance, mais en plus elles évitent ainsi la tentation (à laquelle leurs auteurs avaient néanmoins visiblement su résister) d’encombrer (sauf bien entendu quand le protagoniste vit par et pour la musique) systématiquement, à l’image de tant de romans boboïdes, chaque narration des inévitables musiques que – damn it ! – le protagoniste a envie d’écouter, écoute ou aime, alors que dans 90 % des cas cela n’apporte rien à l’écriture, à part le sentiment diffus que, ah tiens, l’auteur aime bien cette chanson (tentation d’ailleurs superbement parodiée par Fabcaro dans son superbe pastiche déjanté, « Carnet du Pérou »).
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Rétroliens/Pings
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