Cinq nouvelles exceptionnelles sur le séjour de Styron dans l’US Marine Corps, en 1944-45 et en 1953.
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Belle initiative de Gallimard que la publication (en novembre 2011, dans une traduction de Clara Mallier) de ces cinq nouvelles de William Styron, trois déjà publiées en revue et deux inédites, regroupées en 2009 dans le recueil « The Suicide Run » – dont deux d’entre elles devaient servir au roman inachevé « La voie du guerrier », que l’auteur laissa de côté pour écrire « Le choix de Sophie » en 1979.
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Directement fondées sur son expérience de première main du corps des US Marines à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, et sur son bref et angoissant rappel dans cette arme durant la guerre de Corée, ces cinq nouvelles, à l’écriture quasiment parfaite, dépeignent, avec cette même force, toujours capable de susciter des controverses de la magnitude de celles qui suivirent la publication des « Confessions de Nat Turner » en 1967, une journée de la vie d’un adjudant, très professionnel, en charge d’une prison militaire en 1944 (« Blankenship »), la sidération que provoque sur deux officiers réservistes la fréquentation d’un colonel à la fois incroyablement cultivé et néanmoins totalement impliqué dans l’art de la guerre du US Marine Corps (« Marriott le Marine »), la vie folle de ces deux mêmes officiers en permission à New York, et le rôle de la misère sexuelle dans la machine de guerre (« À tombeau ouvert »), et déjà, les curieux contrastes de la vie d’un officier sudiste démobilisé devenu « progressiste yankee » dans une petite ville du Sud raciste, en 1945 (« La maison de mon père »). La vignette finale (« Elobey, Annobon et Corisco ») est une curieuse poésie en prose, quasiment élégiaque, mais néanmoins redoutable dans sa tentative de décrire un moyen « mnémotechnique » de s’abstraire de l’horreur militaire…
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Les nouvelles « Marriott le Marine » et « Blankenship », véritables chefs d’œuvre, résumant en quelques pages magnifiques, l’air de ne pas y toucher, toutes les ambiguïtés tragiques du « métier militaire », appellent à elles seules la lecture de ce recueil.
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Ce qu’on en disait avec beaucoup de justesse dans le Magazine Littéraire est ici. et l’excellent billet d’Elizabeth D. Samet dans le New York Times est là.
Et la résonance à longue distance avec « La très bouleversante confession de l’homme qui a abattu le plus grand fils de pute que la terre ait porté » d’Emmanuel Adely est surprenante.
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Pingback: Note de lecture : "Les sous-lieutenants" (Mário de Carvalho) | Charybde 2 : le Blog - 24 mai 2014